Le besoin de corriger l’autre


On peut dire que j’ai passé ma vie à corriger l’autre. En bonne Madame Je-Sais-Tout, j’avais le sens de la critique extrêmement aigu, et mes critiques pouvaient être autant discrètes que rentre-dedans. J’avais un avis sur tout et tout le monde et, grande généreuse que je suis, je le partageais à tout-va, qu’il soit sollicité ou pas.

Je me souviens encore d’un soir, dans la cuisine chez ma mère, où j’ai ressenti une espèce de dégoût pour moi-même. Il doit y avoir deux ans de ça, nous venions de passer des vacances en famille, et je m’étais rendu compte que je n’arrêtais pas de parler sur le dos de tout le monde. Je n’avais pas vraiment d’arrière pensée, de but en soi, mais il fallait que je critique les comportements des uns et des autres. Je n’avais même pas de préférences au sein de ma tribu, tout le monde y passait.

Ce soir-là, alors que j’étais encore en train de donner mon avis sur l’une de mes soeurs, j’ai enfin réalisé ce que j’étais en train de faire. Je me souviens avoir dit à ma mère « Maman, c’est dingue mais je parle tout le temps sur le dos de tout le monde, je veux que ça cesse ! ». Elle avait ri mais, pour moi, ce fut la première grande réalisation de cet esprit critique qui m’habitait et de son besoin exacerbé de s’exprimer. Tout le temps.

Il n’est bien entendu pas parti du jour au lendemain, et il s’amuse encore à me surprendre aujourd’hui, mais la graine avait été plantée. Au début, je me forçais littéralement à ne pas parler. C’était vraiment très dur et ça ne marchait clairement pas : je finissais par être excédée, chargée d’un trop plein de frustrations, en modalité extrême de ruminations. Comme si mon avis devait absolument être partagé, comme s’il était extrêmement important ! Si si ! Bref, tu t’en doutes, ce chemin semblait (très) long avant d’arriver au but.

Comme j’avais du mal à contrôler la bête, j’ai plutôt passé mon temps à l’observer. C’est comme ça que j’ai découvert l’amplitude de ce travers bien ancré en moi. Tous les sujets étaient bons pour m’exprimer : l’attitude des gens, leurs idées, leurs concepts, leurs croyances, le monde, la politique, la religion, l’éducation, la santé, la science, la spiritualité, et j’en passe. Et tous les moyens de le faire aussi : subtilement, légèrement, âprement, logiquement, distraitement, gentiment, méchamment, etc.

Yep, j’avais attaqué un gros morceau de ma personnalité sans m’en rendre compte. C’est là que la question la plus importante a débarqué : mais pourquoi ? pourquoi je fais ça !? Force était de constater qu’il n’y avait pas de malice derrière cette grande gueule, ni d’attaque personnelle envers quiconque même si ce n’était pas toujours le ressenti en face. 

Parfois, je me rendais compte que je cherchais à changer l’autre dans sa manière de penser, et c’était pour ne pas être seule. Parfois, je cherchais à contrôler l’autre dans sa manière d’agir, et c’était pour me protéger. Mais, la plupart du temps, c’était autre chose… C’était pour EXISTER. Pour être là, remarquée, vivante. Ça venait toucher ma survie.

Je m’identifiais complètement à mes idées, opinions et concepts. Ils étaient devenus importants parce que je croyais qu’ils me définissaient. En réalité, ils répondaient inconsciemment à mes peurs les plus intimes et puissantes : le besoin de vivre, de survivre et donc de communauté.

Aujourd’hui, je suis en phase de déconstruction de ce système. Plus je l’abandonne, plus il est remplacé par la Paix que je suis et qui m’habite. En fait, je ne devrais pas dire qu’il est remplacé par cette Paix, mais plutôt qu’il Lui fait place, car il s’agit bien de ma nature permanente.

Nous ne sommes pas cet esprit agité qui a besoin de survivre et d’exister. Nous n’avons pas besoin de corriger l’autre, ni même de penser. Nous sommes déjà complets, éternels et en paix.

Hier, alors que je consultais les nouveaux commentaires sous une vieille vidéo qui tourne toujours, je souriais. Certains m’applaudissent, d’autres me critiquent plus ou moins violemment, mais je ne vois plus qu’une seule chose : des egos perdus dans ces mêmes besoins que les miens. Ces commentaires ne sont que les formes variées de celui qui ne se reconnaît pas, des cris d’amour. C’est pourquoi je les like, tous, un par un, comme pour leur dire à chacun « Je te vois, je sais, et je t’aime ».

À toi qui lis ces mots en ce moment, je Te vois aussi, en attendant que tu Te voies par toi-même. Tu es sur le chemin et tu y arriveras. Ce qui te semble insurmontable aujourd’hui, te fera sourire demain. Et si tu souhaites être accompagné(e) dans ce processus de transformation, contacte-moi.


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